Fouilles archéologiques
Urgence sur les épaves antiques de Courbiac à Saintes : les études s'accélèrent !
Les deux épaves gallo-romaines découvertes à Courbiac en 2008 lors d'une prospection subaquatique de l'ArepMaref, font l'objet d'un projet de recherche depuis 2015 par l'archéologue Jonathan Letuppe, du bureau d'étude Éveha. Cette année, l'érosion causée par le désenvasement du fleuve en aval, ainsi que la visite de pillards sur le site ces derniers mois, entraînent l'accélération des études.
Par Romain CHARRIER - Publié le 12 septembre 2020
L'archéologue Jonathan Letuppe qui présente le matériel de plongée lors d'une visite organisée par le service Ville d'Art et d'Histoire de la ville de Saintes - Photo © Romain Charrier
Deux épaves de l'antiquité tardive
C'est à 7 mètres de profondeur que reposent les épaves antiques, toutes les deux renversées et à 100 mètres de distantes l'une de l'autre. Depuis 2015, une équipe d'archéologues plongeurs travaille sur l'étude de ces deux navires gallo-romains, sous la direction de Jonathan Letuppe, responsable du pôle de plongée scientifique et d'opération subaquatique et sous-marine chez l'opérateur archéologique Éveha. L'épave n°1, dans un état de conservation très moyen, serait précisément datée du milieu du IVe siècle de notre ère, avec toutefois des éléments de réemploi. La seconde épave est quant à elle dans un état de conservation exceptionnel et a été datée au carbone 14, avec moins de précision pour le moment, entre 250 et 400 de notre ère. Cette année, l'étude se fait au sonar, au sondeur et au lidar afin d'avoir une cartographie précise du fond du fleuve, pour mieux comprendre le contexte et l'environnement des deux épaves, savoir s'il s'agit d'un échouage ou d'un naufrage, ou encore s'il y a une zone portuaire à proximité.
Un intérêt particulier pour l'épave n°2
Les sondages réalisés sur l'épave n°2 ont mis en évidence un navire très bien conservé, de 19m de long pour 3,5m de large, pouvant naviguer sur le fleuve comme sur les côtes. La hauteur de la coque observée est d’environ 1,80 m aux extrémités et d’1 m en son centre. Il est très effilé et à faible tirant d'eau, lui donnant une grande maniabilité et indiquant qu'il devait pouvoir se déplacer rapidement. Des questions se posent encore sur son mode de propulsion. Même s'il faut rester prudent parce que les études ne sont pas terminées, il pourrait s'agir d'un navire militaire. Ce type de bateau, typiquement romano-celtique, est totalement inédit en Saintonge, ce que lui a permis d'acquérir le statut de " Mobilier archéologique exceptionnel ", ce qui justifie sa sauvegarde. Son état de conservation qualifié d'exceptionnel et ses dimensions vont permettre de réaliser une étude fine des éléments architecturaux et d'enrichir la connaissance de l’architecture navale de l'Antiquité tardive dans le fleuve Charente.
Les projets de valorisation
Les idées de mise en valeur ne manquent pas. Un premier projet de restitution 3D et à 360° est en cours de réalisation, en particulier grâce à la photogrammétrie réalisée lors des différents sondages. Un deuxième projet de reconstitution d'une réplique est à l'étude sur le principe de l'archéologie expérimentale, pour comprendre les techniques de construction d'un bateau à l'époque gallo-romaine. Des contacts ont été pris avec la ville de Xanten (ville jumelée avec Saintes) qui cherche justement une épave à répliquer.
Mais le projet de valorisation le plus ambitieux sera le renflouement de l'épave n°2, la mieux conservée, en vue de la restaurer et de l'exposer au public dans un grand musée local dédié à la romanité. Ce projet audacieux devient nécessaire en raison de l'accélération de l'érosion des épaves due au curage du fleuve en aval à Saint-Savinien, mais aussi à cause des pilleurs qui, sans scrupules, ont visité et endommagé le site archéologique il y a quelques mois. Cette opération de renflouement se déroulerait d'ici deux à trois ans, sur une période de six mois et consisterait en une opération de découpe en tronçons de trois mètres, pour les remonter un à un à la surface, les étudier puis les envoyer à ARC-Nucléart à Grenoble pour une restauration par injection de polyéthylène glycol. La restauration durerait près de deux années, on pourrait alors espérer une exposition de l'épave au public d'ici quatre à cinq ans.
Un navire qui pourrait alimenter le projet de musée tant attendu par les saintais, mais est-ce que la nouvelle municipalité saura se saisir de cette opportunité exceptionnelle pour créer un véritable musée archéologique à Saintes dans ce délai, où laissera-t-elle l'épave restaurée partir par exemple au musée d'Aquitaine à Bordeaux qui a déjà exprimé son intérêt pour exposer un tel navire ?
Article Romain CHARRIER - 12 septembre 2020
Source : Visite de chantier organisée par le service Ville d'Art et d'Histoire de la ville de Saintes le 8 septembre 2020.
Projet de recherche archéologique sur les épaves de Courbiac par l'archéologue Jonathan Letuppe d'Éveha, avec le soutien de la Ville de Saintes, le SRA, le Département de la Charente-Maritime depuis cette année et Éveha.
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