Site archéologique
Site Saint-Louis : Le rempart antique
Le long de l'enceinte de l'ancien hôpital Saint-Louis et du couvant de la Providence se trouvait le rempart du Bas-empire romain, construit probablement dans le dernier quart du IIIe siècle de notre ère, voire au tout début du IVe siècle. Comme la plupart des villes de la Gaule romaine, MEDIOLANVM a connu au début du Bas-Empire Romain un phénomène de transformation radicale par la construction d’une enceinte qui n’englobait qu’une partie de l’agglomération antique.
Par Romain CHARRIER - Publié le 5 février 2019
Éléments lapitaires du rempart du Bas-Empire - Photo Naud © Ministère de la Culture - Base Mérimée
Les bâtiments publics des Ier-IIe siècles seront démantelés pour réutiliser les blocs de pierre, souvent sculptés, afin d'asseoir les fondations du mur d’enceinte du rempart. Les nouvelles fortifications, élevées autour d’un noyau urbain préexistant, étaient longues d’environ 1,5 km et la ville fortifiée - le castrum - ne couvrait plus que 16 hectares (contre une centaine sous le Haut-Empire Romain). Les quartiers extérieurs furent abandonnés.
Ce rempart a fait l'objet d'observations très tôt et à de nombreuses reprises. Les plus anciennes mentions remontent à 1609 et 1629 lors de la construction des bastions. En 1763, Pierre Beaumesnil en a restitué un dessin un peu fantaisiste (ci-dessous). Il n'en reste aujourd'hui que le tracé (carte ci-desous), certains éléments sont encore visibles depuis la rue Bernard le long de l'ancienne morgue. Les élements architecturaux en ont été extraits au fil des explorations pour alimenter le fond lapidaire de la ville de Saintes, un temps exposés au musée lapidaire, aujourd'hui enfermés dans les réserves archéologiques de la ville à l'ancienne trocante et au dépôt de Lormont. D'autres traces sont observables place des Récollets près de Saint-Pierre, dans la ville basse.
Les fouilles du rempart par l'abbé Julien Lafferrière - 1887/1888
En 1887 et 1888, l'administration de l'hôpital Saint-Louis a procédé à la démolition d'une partie de l'ancienne fortification antique qui bordait l'ouest de l'enceinte du site pour le reconstruire avec une moindre épaisseur. L'abbé Julien Lafferrière a participé à ces travaux pour en extraire les blocs les plus prestigieux et alimenter les collections lapidaires de la ville. Il a réalisé plusieurs clichés pour illustrer ces travaux (photos ci-desous). Il a pu noter que le rempart sur le site Saint-Louis faisait près de 4 mètres d'épaisseur, jusqu'à 5 mètres de hauteur, sur 160 mètres de long, entre la rue Cabaudière et la rue Bernard.
Il est constitué de huit assises de blocs de grand appareil soigneusement assemblés pour parementer les faces interne et externe du rempart, comblé par des blocs décorés de toute sorte, des fûts de colonne, des corniches décorées, etc. 67 mètres du rempart ont été démantelés entre la rue Cabaudière et l'entrée actuelle de l'ancien hôpital, ainsi que 15 à 25 mètres de la face sud-ouest du site qui domine la rue Cabaudière. Les blocs sont directement posés sur les vestiges du quartier antique, le long du possible cardo maximus de la cité, au-dessus d'un fossé dit sans fond qui devait border la voie et le trottoir antique.
Les fouilles du rempart par l'archéologue Louis Maurin - 1979
À l'occasion de travaux de terrassement le long de l'enceinte de l'hôpital Saint-Louis en 1979, l'archéologue Louis Maurin a eu l'opportunité de fouiller 12 mètres du rempart du Bas-Empire, entre la rue Bernard et l'entrée de l'ancien hôpital. Il a pu constater que le rempart était constitué d'une semelle de 3,90m de large posée sur un dallage remployé (provenant du pavage d'une place ou du sol d'un bâtiment), dallage également posé sur les vestiges antérieurs (murs et caniveaux). Au-dessus, quatre assises dont la largeur se réduit avec la hauteur. Les blocs de pierre de grand appareil sont assemblés soigneusement, constituant les parements interne et externe, non solidaires. L'intérieur est « bourré » d'éléments moins homogènes mais soigneusement imbriqués et calés. Les blocs des monuments d'origine ont été remployés dans le même ordre pour éviter la retaille et constituer des assises de même hauteur.
Sous la semelle du rempart, l'archéologue a pu sonder les vestiges antérieurs à la fortification : deux murs parallèles correspondant à un caniveau ou un égout sans fond daté selon le mobilier de l'époque flavienne (deuxième moitié du Ier siècle de notre ère). Un des murs, plus large, comporte deux bases de piliers, soutenant les probables colonnes d’un trottoir à portique. L'ensemble devait border un cardo. Dans les blocs architecturaux qui ont été extraits de cette portion du rempart, il y a entre autre un bloc de corniche d'un grand entablement d'époque flavienne et un chapiteau ionicisant de la même époque, mais également des chapiteaux attribués au style du second Triumvirat (dernier tiers du Ier siècle avant notre ère, augustéen, voire préaugustéen).
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Article Romain Charrier 05/02/2019
Source : Carte archéologique de la Gaule 17/2 – Louis Maurin – 2007 – pages 281, 327 et 328 et pages 325 & 326
Illustration rempart : Antiquités des villes de Saintes[...] Pierre Beaumesnil 1763
Photo : Rempart du site Saint-Louis - Abbé Julien Laferrière - 1887
Photo montage du tracé du rempart de Saint-Louis : Romain Charrier avec photo aérienne Géoportail
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