Recherches archéologiques
Le port antique de MEDIOLANVM, selon l'archéologue Jean-Philippe Baigl
Jean-Philippe Baigl, archéologue de référence à Saintes ces vingt dernières années, publie une étude sur le port antique de Saintes dans la revue Gallia, en collaboration avec Adrien Camus, Olivier Dayrens, Vincent Lebaron, Jonathan Letuppe et Vivien Mathé. L'étude fait le point sur l'état des connaissances des activités portuaires de la ville antique et sur les découvertes récentes de ses infrastructures potentielles.
Par Romain CHARRIER - Publié le 1er juin 2021
Fouilles des fondations de l'arc romain, place Bassompierre, 2004 © Jean-Philippe Baigl, Inrap
Le sujet était déjà évoqué par l'archéologue en 2013 dans une table ronde intitulée « Le port de Saintes n’est pas à Barzan », et a été l'un des thèmes de son PCR « Saintes no limit » dans la partie Relations de la ville avec le fleuve et la mer, Jean-Philippe Baigl analyse dans le dernier numéro de la revue Gallia, les preuves de l'existence d'un port antique à Mediolanum. L'exportation des productions de céramique saintaise, la proximité des ateliers de production avec le fleuve (Bois d’Amour, Canal de dérivation, la Prairie), la présence d'épaves dans le lit du fleuve sont des éléments de preuve de la présence d'une activité portuaire importante à Saintes.
Le pont romain et la berge antique
Les diagnostics archéologiques réalisés en 2004 place Bassompierre et dans le lit de la Charente en 2015 ont permis de restituer l’axe de la berge antique, parfaitement perpendiculaire à celui du pont romain traversant le fleuve. Les sondages de 2004 ont mis au jour les fondations originelles de l’arc romain déplacé au XIXe siècle. Les vestiges observés sont des blocs de grand appareil reliés entre eux par des crampons en bois, servant de fondation à l'arc. Une assise semi-circulaire est accolée à ce massif, avec des madriers disposés de façon rayonnante, l'ensemble servant de renfort à la maçonnerie en grand appareil. Ce renfort semble postérieur aux fondations de l'arc. C’est sous un morceau de madrier que l’archéologue a découvert une semelle de chaussure en cuir cloutée qu’un ouvrier (gallo-romain ?) aura perdu pendant le chantier.
Dans le lit du fleuve, ce sont des alignements d’une cinquantaine de pieux conservés qui ont été relevés lors des sondages subaquatiques de 2015, à une dizaine de mètres du quai actuel. L’orientation est cardinale (nord-sud), en opposition à l’orientation décumane (est-ouest) de la voie d’Agrippa et du pont. Les pieux sont pour la plupart en chêne et la dendrochronologie a permis de les dater autour de 29 de notre ère. Une possible épave a également été observée le long du quai antique.
Des quais et des horrea ?
D'autres aménagements ont été découverts en aval du pont Palissy. En 1985, lors de travaux de dragage, plusieurs madriers avaient été dégagés. Ils ont été interprétés comme les probables aménagements d'une berge romaine, grâce à une datation au Carbone 14 autour de 270 de notre ère. D’autres madriers horizontaux et perpendiculaires à la berge ont été étudiés sur une cinquantaine de mètres lors de prospections subaquatiques en 2013-2014 dans ce même secteur, se prolongeant même sur 120m vers le pont Palissy. L’un des madriers prélevé en 2013 a été daté au Carbone 14 entre 3 et 134 de notre ère.
Des prospections géophysiques (électromagnétique et tomographie de résistivité électrique) ont été réalisées en 2014 dans la Prée Basse (au nord de la rive droite). Un ensemble de 50m sur 22m, constitué de plusieurs cellules, avait été identifié par des photographies aériennes et par un Lidar, faisant penser à des horrea (entrepôts antiques). Les prospections géophysiques confirment l'existence d'un ensemble, sans pour autant attester qu'il s'agisse de maçonneries. Deux autres ensembles (bâtiments ?) ont été repérés non loin des berges, un carré de 30m de côté, l'autre de 10m sur 15m. La tomographie a également permis d'identifier un empierrement d'au moins 100m de longueur pouvant correspondre à un quai antique. Seuls des sondages archéologiques pourraient confirmer l'existence d'une zone portuaire dans ce secteur.
Au croisement des axes
Les aménagements de la berge sur la rive droite de la Charente semblent donc s'étaler de la Prée Basse jusqu'à la Place Bassompierre. L'archéologue Jean-Philippe Baigl indique que certains de ces éléments remontent au tout début du Ier siècle de notre ère, au moment de la monumentalisation urbaine de Mediolanum. Il suppose que les mêmes aménagements étaient présents sur les berges de la rive gauche, où s'est développé le principal de la ville. A partir de ces installations portuaires s'exportaient entre autre les céramiques saintaises produites dans les officines du bord du fleuve. La présence d'épaves confirme l'existence d'un trafic fluvial sur cet axe de communication qu'était le fleuve Charente, croisant à Saintes la voie routière créée par Agrippa, reliant Lyon à l'Atlantique. Jean-Philippe Baigl insiste sur l'importance de l'étude des zones portuaires de Saintes pour comprendre l'essor très précoce de la ville, son évolution et surtout son déclin dès le milieu du IIe siècle. Pour en savoir plus, découvrez l'article complet de l'archéologue sur https://journals.openedition.org/gallia/5358
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Article Romain CHARRIER - 1er juin 2021
Le port antique de Saintes/Mediolanum (Charente-Maritime), Jean-Philippe Baigl, Gallia 77-1 2020
Pour en savoir plus, article complet sur https://journals.openedition.org/gallia/5358
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