Site archéologique
Les remparts du Bas-Empire de MEDIOLANVM
Comme la plupart des villes de Gaule romaine, MEDIOLANVM a connu au début du Bas-Empire Romain un phénomène de transformation radicale par la construction d’une enceinte qui n’englobait qu’une partie de l’agglomération antique. La réorganisation de la ville et l'édification des remparts fait suite à une première phase de contraction de la cité. La ville perd son statut de capitale régionale probablement dans la deuxième moitié du IIe siècle, son déclin administratif et économique entraîne l'abandon des quartiers nord et ouest. Les causes et les dates précises de ce bouleversement ne sont pas clairement établies.
Par Romain CHARRIER - Publié le 17 avril 2017
Photo de l'intérieur du rempart évidé - Site Saint-Louis - Julien Lafferière - 1887
Des remparts du tout début du IVe siècle ?
On a longtemps cru que les remparts de MEDIOLANVM dataient entre le milieu et le dernier quart du IIIe siècle de notre ère, correspondant aux incursions dites "barbares" des années 270. En réalité cette période correspondrait à la construction de remparts à Rome et dans les cités proches des Limes germaniques dans la Gaule Belge. Ces cités se sont remparées pour se protéger des incursions germaniques. La construction des remparts de Saintes doit être plus tardive, correspondant à une deuxième phase de fortification des cités gallo-romaines au début du IVe siècle. Les archéologues estiment que Saintes est trop loin des Limes pour avoir été victime des incursions de la fin du IIIe siècle et ses remparts sont de bonne qualité et ne semblent pas avoir été construit à la hâte.
Alors que la ville ouverte s'étendait sur les hauteurs du plateau, les nouvelles fortifications sont élevées dans la partie basse de la rive droite du fleuve, peut-être autour d’un noyau urbain préexistant et n'englobant qu'une partie infime du plateau. Le rempart était long d’environ 1,5 km et la ville fortifiée - le castrum - de MEDIOLANVM ne couvrait plus que 16 hectares, alors que la ville ouverte couvrait plus d'une centaine d'hectares sur la rive gauche du fleuve sous le Haut-Empire Romain. Des tours de 8 mètres de diamètre devaient être positionnées tous les actus (35 mètres). Le castellum est placé sur les hauteurs du promontoire. Les remparts longeaient l'actuelle place du 11 Novembre (qui a été construit sur le comblement de ses anciens fossés), puis descendait vers le fleuve le long de l'actuel cours National, longeait la boucle de la Charente en reprenant le tracé d'une partie des rues de la Poste, de l'Abreuvoir, la place des Récollets, la rue Aliénor d'Aquitaine, les rues Cuvilliers et Saint-Maur, jusqu'à la place Saint-Louis), pour remonter et englober le promontoire (ancien hôpital Saint-Louis et couvent de la Providence) en reprenant le tracé du cardo maximus, la rue principale d'orientation nord/sud qui devait longer l'ancien forum.
Les remparts ont laissé des traces dans la ville, facilement repérable sur les cartes avec la topographie et la toponymie. Les quartiers extérieurs sont alors abandonnés. D’importants monuments, pour certains déjà délaissés (temples, forum, basilique), sont démantelés pour réutiliser les blocs de pierre, souvent sculptés, afin d'édifier le puissant mur d’enceinte haut d'au moins 5 mètres. Ce sont les fondations de ces murs qui sont encore visibles place des Récollets et dans l’enceinte de l’ancien hôpital Saint-Louis.
Elaboration du rempart
Le remploi de blocs monumentaux issus du démontage des bâtiments publics des Ier-IIe siècles montre qu’au début du IVe siècle, une grande partie de ces infrastructures publiques du Haut-Empire Romain étaient abandonnées. On peut encore voir le soubassement en blocs de grand appareil sur la place des Récollets, qui à l’origine avait une hauteur de plus de 5 mètres pour une épaisseur d’approximativement 4 mètres. Dans ces terrains alluvionnaires instables, situés près de la Charente, les fondations reposaient sur des pieux en bois.
Les nombreuses fouilles du rempart sur le site Saint-Louis depuis le XIXe siècle ont montré qu'il était constitué des blocs antiques remployés sur au moins 5 mètres de hauteur. Il était constitué de deux murs parallèles d'imposants blocs architecturaux, comblé par d'autres blocs à l'intérieur, le tout sur 4 mètres d'épaisseur. Les parties lisses des pierres étaient soigneusement exposées en façade, les parties sculptées étaient cachées à l'intérieur du rempart (voir photo en entête de l'intérieur du rempart évidé lors des fouilles de 1887). Une partie de ce rempart est toujours visible dans l'enceinte de l'ancien hôpital Saint-Louis depuis la rue Bernard.
Le rempart flanqué de tours devait avoir un rôle ostentatoire et militaire. Le pont, dans le prolongement de la voie d'Agrippa, fut intégré à cette nouvelle ville et en constituait le passage principal et monumental. Il contribua à la mise en place d’une nouvelle identité urbaine qui allait se pérenniser jusqu’au XVIIIe siècle. Une autre des entrées de la ville remparée était sur les hauteurs de l'actuelle rue Alsace-Lorraine (porte Aiguière). Une troisième entrée était peut-être déjà présente place Saint-Louis (porte Evêque, attestée au Moyen-Âge). La ville médiévale se développera à l'intérieur de cette enceinte. Lors de la christianisation, c’est à l’intérieur du castrum, contre le rempart, que les évêques établirent leur cathédrale, dédiée à Saint-Pierre.
Au Moyen-Âge, vers les XIe/XIIe siècle le tronçon oriental (le long de la Charente) fut démoli pour être remplacé par une enceinte située plus près du fleuve, permettant d'agrandir la surface intra-muros de la ville. Lors des fouilles de 1887, de nombreux blocs gravés ou sculptés provenant de monuments publics ou funéraires ont été retrouvés. Aujourd’hui, ils font partie de la collection lapidaire de la ville et témoignent de la qualité de la parure monumentale de ces premiers siècles de notre ère.
Les vestiges des remparts à Saintes
On peut observer les vestiges de ces remparts antiques à deux endroits en ville, place des Récollets près de la Charente et dans l'enceinte de l'ancien hôpital Saint-Louis. La démolition d'un des bâtiments de l'ancien hôpital de Saintes-17 a récemment permis de libérer la vue sur une partie de ce rempart du Bas-Empire. Les éléments lapidaires (fûts de colonne, chapiteaux, corniches, pilastres...) ont été remployés pour la construction de ce rempart au IVe siècle.
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Romain CHARRIER - 17 avril 2017 - Dernière maj 15/05/2019
Sources : Informations tirées des travaux de Louis Maurin ( Saintes antique - 1978 & Carte archéologique de la Gaule 17/2 Saintes - 2007) et lors d'échanges avec l'historien médiéviste Alain Michaud et l'archéologue Pierre Tronche, spécialiste des lapidaires de Saintes.
Photo de l'intérieur du rempart évidé - Site Saint-Louis - Julien Lafferière - 1887
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Ce blog est un média dédié à l'histoire de MEDIOLANVM (nom antique de Saintes), à l'actualité archéologique en Saintonge (et parfois au-delà) et de son peuple celte les SANTONES. Je ne suis ni archéologue, ni historien, juste un amateur passionné par ces sujets, vice-président de la Société d'archéologie et d'histoire de la Charente-Maritime. Les informations de ce site sont tirées d'ouvrages, de rapports de fouilles, de communiqués de presse, de conférences, de visites de chantiers archéologiques, de rencontres et d'entretiens avec des spécialistes.
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